Comprendre et respecter la loi en un clic grâce à la solution TOSSIN
Face à la complexité et à l’inaccessibilité des textes juridiques au Bénin, la startup RAB TECH propose une solution innovante, TOSSIN. Il s’agit d’une application mobile qui permet aux citoyens et aux entreprises d’accéder facilement aux lois en République du Bénin et au-delà.
« Monsieur, vous êtes en infraction ! » Jules, un jeune meunier résidant à Bohicon, ne s’attendait pas à recevoir une amende pour non-respect du temps de repos face à la pollution sonore que génère son moulin à maïs. Pourtant, il n’avait jamais entendu parler de cette règle. Comme lui, beaucoup de citoyens et d’entreprises ignorent les Lois faute d’un accès facile aux textes juridiques.
Pour résoudre ce problème, une solution dénommée en langue nationale Fon, TOSSIN, et qui signifie en français « Loi du peuple », a été créée et développée par la startup RAB TECH. Elle permet d’accéder aux lois en République du Bénin et dans bien d’autres pays, directement sur son téléphone portable, en un clic et en quelques secondes. Disponible sur Google Play via le lien http://www.bit.ly/tossin-app, cette solution est également accessible en version texte et audio.
« Nous avons une application qui nous donne accès à la loi, permet de la lire et de l’écouter en audio, et de gérer une liste de favoris », a déclaré Roland Alavo, son promoteur. Il précise qu’une fois qu’une loi est téléchargée sur le portable, le citoyen n’a plus besoin de connexion internet pour y accéder en tout temps. « Nous vous permettons d’aller télécharger le fichier PDF de la source pour garantir l’authenticité du travail ».
Selon Amnesty International, c’est un « projet important pour l’éducation aux droits humains ». Parmi les textes disponibles, on trouve la Constitution du Bénin, le Code pénal, le Code de l’Enfant, la loi-cadre sur l’environnement, le Code du numérique, et bien d’autres.
Si nul n’est censé ignorer la Loi, les textes juridiques sont souvent longs et compliqués pour le citoyen lambda. La langue utilisée est difficile à comprendre pour la plupart des gens, même pour les juristes, qui ont parfois du mal à tout retenir. De plus, de nombreuses entreprises ignorent les règles qu’elles doivent respecter.
Une étude de l’Union Africaine menée en Afrique de l’Ouest en 2020 a montré que la majorité des citoyens ne savent pas où trouver les Lois de leur pays, et que de nombreuses petites et moyennes entreprises ont du mal à identifier leurs obligations légales.
Un accès simplifié aux textes législatifs
TOSSIN rend les textes de Loi accessibles et compréhensibles par tous. Grâce à cette application, chaque utilisateur peut consulter les Lois en version numérique, les écouter en audio, et les explorer par thématique. Une fonctionnalité permet également de surligner des passages importants et de créer une liste d’articles favoris. Un moteur de recherche performant aide à retrouver facilement des textes à partir de mots-clés.
Pour les entreprises, cette solution propose une version avancée qui leur permet d’accéder aux exigences légales spécifiques à leurs activités. Elles peuvent consulter les règles qui s’appliquent à leur secteur, ajouter leurs propres exigences internes et évaluer leur niveau de conformité. Un tableau de bord permet de suivre en temps réel les actions mises en place pour respecter la réglementation.
Le juriste Qowiyou Fassassi, l’initiative de TOSSIN soutient le droit à l’information, un principe fondamental inscrit dans la loi n°2015-07 portant code de l’information et de la communication. Les articles 70 à 107 sont particulièrement significatifs à cet égard, car ils sont directement liés à l’accès à l’information tel que défini au chapitre IV.
Pour Achille Azonhoumon, un utilisateur de l’application, le travail accompli par TOSSIN est remarquable et mérite d’être soutenu par le ministère de la Justice afin d’en renforcer l’impact. Un constat partagé par Zimé Oroutamou, « TOSSIN constitue un cadre fédérateur des lois de la République. Grâce à son interface intuitive, elle facilite une recherche rapide et un accès simplifié aux textes législatifs ».
Aujourd’hui, TOSSIN enregistre plus de 56 000 téléchargements de son application, plus de 72 000 téléchargements de Lois, et plus de 20 000 utilisateurs ponctuels. Elle a d’ailleurs remporté le premier prix Jeunesse Francophone.
L’application couvre déjà les Lois de vingt pays ainsi que les traités de cinq organisations internationales. Elle s’adresse aux citoyens, aux juristes, aux étudiants en droit et en relations internationales, aux acteurs politiques, aux gouvernements, aux organisations de la société civile, ainsi qu’aux entreprises.
L’histoire de TOSSIN a commencé en décembre 2016, avec l’initiative de rendre les Lois plus accessibles. Entre 2017 et 2018, l’équipe a travaillé sur un prototype. En 2019, la première version de l’application a été mise en production. L’année suivante, une campagne intensive a permis de numériser plus de trois cents Lois béninoises en seulement quinze jours. En 2021, le projet a pris une dimension internationale avec l’intégration des Lois de 20 pays en huit différentes langues.
Aujourd’hui, TOSSIN continue d’élargir sa base de données, avec pour ambition de couvrir tous les pays du monde. Elle facilite non seulement l’accès aux Lois mais aussi contribue à l’atteinte des Objectifs de Développement Durable, notamment ceux liés à l’accès à la justice, à la réduction des inégalités, à l’éducation et à l’égalité des genres.
TOSSIN vient compléter et renforcer les efforts déjà entrepris par le gouvernement du Bénin pour améliorer l’accès à la législation. Il s’agit des plateformes existantes, telles que celle du Secrétariat Général du Gouvernement et du Centre de Documentation et d’Information Juridique.
Dans un monde où la Loi régit tous les aspects de la vie en société, des initiatives comme TOSSIN apporte une réponse concrète pour que chacun puisse s’informer, comprendre et agir en toute légalité.
Cet article est rédigé dans le cadre de la bourse du Programme de journalisme sur les Infrastructures Publiques Numériques (IPN) de la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) en collaboration avec Co-Develop.
Megan Valère SOSSOU