Nice sonne l’alerte et l’engagement pour les océans

Sur les rives de la Méditerranée, la ville de Nice a accueilli, du 9 au 13 juin, la troisième Conférence des Nations Unies sur l’océan (UNOC3), co-organisée par la France et le Costa Rica. L’événement a réuni 15 000 participants, dont plus de 60 chefs d’État et de gouvernement, venus des quatre coins du monde pour réfléchir à l’avenir des mers et des océans.

La clôture a été marquée, vendredi, par le puissant concert des cornes de brume des navires du port de Nice. Juste avant, plus de 170 États avaient adopté une déclaration politique ambitieuse visant à accélérer la préservation des océans.

« Nous clôturons cette semaine historique non seulement avec de l’espoir, mais avec des engagements concrets, une direction claire et une dynamique incontestable », a affirmé Li Junhua, secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires économiques et sociales, et secrétaire général de la conférence.

Un plan d’action global

La conférence a donné naissance au Plan d’action de Nice, fondé sur deux piliers : une déclaration politique commune des États membres, et plus de 800 engagements volontaires portés par des gouvernements, des scientifiques, des agences de l’ONU et des représentants de la société civile.

Parmi les annonces les plus marquantes, la Commission européenne a promis un milliard d’euros pour la conservation des océans, la science marine et la pêche durable. La Polynésie française a quant à elle annoncé la création de la plus grande aire marine protégée au monde, couvrant l’ensemble de sa zone économique exclusive, soit environ cinq millions de kilomètres carrés.

L’Allemagne s’est engagée à hauteur de 100 millions d’euros pour le retrait de munitions immergées dans les mers du Nord et Baltique. De son côté, la Nouvelle-Zélande a débloqué 52 millions de dollars pour améliorer la gouvernance océanique dans le Pacifique. L’Espagne a annoncé la création de cinq nouvelles aires marines protégées.

Une coalition de 37 pays, menée par le Panama et le Canada, a lancé la High Ambition Coalition for a Quiet Ocean, pour lutter contre la pollution sonore sous-marine. Par ailleurs, l’Indonésie, en partenariat avec la Banque mondiale, a présenté une « obligation corail » destinée à financer la conservation des récifs coralliens.

« Les vagues du changement déferlent », a souligné M. Li. « Il est désormais de notre responsabilité collective de les endosser – pour les peuples, pour la planète, pour les générations futures ».

Une scène de diplomatie planétaire

L’ouverture de la conférence a été marquée par un constat sans appel du secrétaire général de l’ONU, António Guterres : « Nous ne traitons pas l’océan à la hauteur de ce qu’il est – le bien commun mondial par excellence. »

Les présidents Emmanuel Macron et Rodrigo Chaves Robles ont, quant à eux, plaidé pour un renouveau du multilatéralisme, fondé sur la science.

Lors de la clôture, l’envoyé spécial de la France, Olivier Poivre d’Arvor, a rappelé le pari de cette édition : « À Nice, nous avons voulu tenter un pari : celui d’un changement transformateur. Je pense que nous avons avancé, mais nous ne pouvons plus reculer. »

L’un des objectifs principaux de la conférence était d’accélérer l’entrée en vigueur du traité sur la haute mer (BBNJ), adopté en 2023. Avec 19 ratifications supplémentaires annoncées cette semaine, le traité compte désormais 50 ratifications sur les 60 requises. « C’est une victoire considérable », a déclaré M. Poivre d’Arvor. « Il est très difficile d’agir pour l’océan aujourd’hui, alors que les États-Unis sont aussi peu impliqués. » Faisant référence à l’absence de hautes autorités américaines et à l’ordonnance du président Donald Trump visant à lancer l’exploration minière dans les grands fonds marins, il a insisté :

« Les abysses ne sont pas à vendre. » Il s’est toutefois félicité de la participation massive : « Un pays est peut-être absent, mais 92 % des copropriétaires étaient présents aujourd’hui à Nice. » Le ministre des Affaires étrangères du Costa Rica, Arnoldo André-Tinoco, a appelé à un engagement ferme en faveur du financement de la protection océanique : « Chaque engagement doit être scrupuleusement suivi. »

Un moment charnière pour l’avenir marin

Peter Thomson, envoyé spécial de l’ONU pour l’océan, a souligné l’importance du tournant que représente cette conférence : « Ce n’est pas tant ce qui se passe lors de la conférence qui compte, mais ce qui en découle. » Il a évoqué les avancées majeures depuis l’adoption de l’ODD 14 en 2015 : « En 2015, nous étions dans un désert… Regardez où nous en sommes aujourd’hui ! »

Tous les regards sont désormais tournés vers la quatrième conférence, prévue en 2028 au Chili et en Corée du Sud. Peter Thomson a exprimé son espoir de voir d’ici là les grands accords multilatéraux pleinement ratifiés et appliqués : le BBNJ, l’accord de l’OMC sur les subventions à la pêche, et le futur traité sur les plastiques. « Que ferons-nous quand cet objectif arrivera à maturité ? Il faudra aller plus loin, faire preuve de plus d’ambition. »

Saluant les engagements exemplaires des petits États insulaires, il a lancé : « Si de petits pays peuvent faire de grandes choses, pourquoi les grands ne suivraient-ils pas ? » Portant un collier offert par les îles Marshall, il a rappelé : « Les premiers bénéficiaires des aires marines protégées, ce sont les communautés de pêche. »

Des tensions en filigrane

Malgré l’élan général, certaines divergences ont émergé. Les petits États insulaires en développement (PEID) ont exigé une reconnaissance plus forte des pertes et dommages causés par le changement climatique, au-delà de leurs capacités d’adaptation : « On ne peut pas avoir de déclaration sur les océans sans les PEID », a rappelé un délégué.

D’autres voix, notamment celle du président du Costa Rica, ont plaidé pour un moratoire sur l’exploitation minière en haute mer. Cette demande ne figure cependant pas dans la déclaration finale.

Le texte adopté réaffirme néanmoins l’objectif de protéger 30 % des terres et mers d’ici 2030, et soutient plusieurs cadres internationaux, tels que l’accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité ou encore la stratégie climatique de l’OMI.

« La véritable épreuve, ce n’est pas ce que nous avons dit ici à Nice, mais ce que nous ferons ensuite », a conclu M. Li. Alors que la lumière déclinait sur la Promenade des Anglais, la mer, silencieuse mais omniprésente, restait le témoin immuable d’une promesse collective : fragile, mais bien réelle.

Megan Valère SOSSOU




De l’Afrique de l’Ouest au sud-ouest de l’océan Indien : l’action régionale du GRID-Arendal contre la pêche INN prend de l’ampleur

Dans sa lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), Madagascar a organisé une formation intensive à la surveillance aérienne qui a présenté les technologies de pointe des drones aux autorités des pêches, aux agences gouvernementales et de surveillance, ainsi qu’aux acteurs locaux. Cet atelier, organisé par le gouvernement malgache et le WWF-Madagascar en partenariat avec GRID-Arendal et Distant Imagery, s’inscrit dans le cadre d’un programme plus vaste d’économie bleue durable du sud-ouest de l’océan Indien (SWIO-SBE), financé par l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (NORAD).

Une personne tenant un appareil avec écran.  Description générée automatiquement.
Un groupe de personnes debout sur une plage  Description générée automatiquement

Vol de démonstration à Madagascar

Un drone dans une boîte posée sur un bloc de béton  Description générée automatiquement

Démonstration de drones à ailes Delta à Madagascar

Capture d'écran d'un jeu vidéo  Description générée automatiquement

Vol de nuit à Madagascar

Pendant trois jours, des participants du Centre de Surveillance des Pêches (CSP), du Ministère des Pêches et de l’Économie Bleue, du WWF et de l’Observatoire Indépendant des Pêches (FITSINJO) ont bénéficié d’une formation pratique sur l’assemblage et la construction locale de drones, l’intégration des opérations aériennes aux systèmes existants de Suivi, Contrôle et Surveillance (SCS) des pêches, et les techniques de surveillance en temps réel. Des démonstrations en direct au-dessus de la baie de Diego ont démontré la puissance des outils aériens pour détecter et dissuader les activités illégales.

Cette formation marque une avancée significative pour Madagascar. En intégrant la surveillance aérienne à notre stratégie nationale de pêche, nous comblons des lacunes techniques critiques en matière de capacités en adoptant des innovations qui nous aideront à protéger nos océans et à soutenir les communautés qui en dépendent.

 Rijasoa Fanazava, directeur exécutif, Centre de surveillance des pêches (CSP), ministère de la Pêche et de l’Économie bleue

Une approche holistique de la gouvernance des pêches

Si la formation aux drones constitue une avancée notable, le GRID-Arendal souligne que les outils technologiques ne constituent pas à eux seuls une solution miracle. Une réponse véritablement efficace à la pêche INN doit être globale : elle doit intégrer l’innovation aux réformes juridiques et institutionnelles, à la collaboration interinstitutionnelle, à l’harmonisation régionale et au développement des capacités à long terme.

Un groupe d'hommes assis autour d'une table  Description générée automatiquement

Intégration de la technologie des drones dans le système MCS des pêches en Guinée

« L’utilisation des technologies de télédétection en combinaison avec les technologies des drones fournit un outil complémentaire puissant aux États côtiers pour mieux protéger leurs ressources marines, améliorer la transparence et améliorer la gouvernance marine globale »,

— Romain Langeard, expert en gouvernance des pêches du GRID-Arendal

Cette philosophie sous-tend le travail de GRID-Arendal au-delà de Madagascar. En Guinée, par exemple, le projet « Renforcer la gouvernance des pêches » lancé en 2021 va au-delà de la surveillance en renforçant les cadres juridiques nationaux, en révisant les mandats institutionnels, en soutenant la mise en œuvre des traités internationaux comme l’Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port (PSMA) et en améliorant les voies de poursuite et de sanction des infractions liées à la pêche. Dès 2015, aux Seychelles, l’initiative « FishGuard » utilise les données satellitaires et les systèmes VMS non seulement pour l’application de la loi, mais aussi pour améliorer la coordination entre les agences maritimes, les autorités portuaires et les organismes de surveillance environnementale.

Un groupe de personnes sur un bateau  Description générée automatiquement

Déploiement de drones depuis un bateau en Guinée

Plus récemment, en Guinée-Bissau, dans le cadre du projet Bijagos Bleus, en partenariat avec le Partenariat régional pour la conservation marine (PRCM), un travail complémentaire de développement des capacités bleues a été mené par GRID-Arendal, renforçant ainsi la solidité institutionnelle locale. Ce projet soutient les organismes de première ligne, les organisations de la société civile et les communautés côtières en leur fournissant les compétences, les outils et les systèmes de gouvernance nécessaires pour gérer efficacement leurs espaces marins et soutenir les moyens de subsistance locaux sur le long terme.

Soutenir la collaboration interinstitutions régionale

L’initiative de Madagascar renforce également l’importance de la coopération interinstitutionnelle, pierre angulaire d’une gestion efficace des pêches. Le GRID-Arendal œuvre aux niveaux national et régional pour améliorer la coordination entre les autorités des pêches, la police maritime, la marine, les douanes, les autorités portuaires et les organismes régionaux de pêche. Ces liens sont essentiels pour exploiter le renseignement, partager les données et garantir une application cohérente et équitable des règles.

Ce projet pilote est plus qu’une simple mise à niveau technologique : il représente un changement radical dans notre façon de gérer nos ressources marines. Les drones offrent une surveillance rapide et économique qui peut combler d’importantes lacunes en matière de contrôle, notamment dans les zones côtières reculées où la pêche artisanale est la plus active et la plus vulnérable.

— Umair Shahid, responsable des pêches du WWF pour la région SWIO.

Le projet pilote de surveillance aérienne s’inscrit dans une vision régionale plus large de systèmes SCS accessibles et peu coûteux, adaptables et maîtrisables localement. Les enseignements tirés seront intégrés à des notes d’orientation destinées à la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI), à la Commission des pêches du sud-ouest de l’océan Indien (SWIOFC) et au Centre de coordination SCS de la SADC à Maputo. Pour ce faire, GRID-Arendal et le WWF développeront conjointement des outils de communication visuelle, des infographies et des boîtes à outils visant à sensibiliser et à développer une compréhension pratique des meilleures pratiques en matière de surveillance et de contrôle.

Un modèle évolutif à travers les régions

Le portefeuille plus large de GRID-Arendal reflète ce modèle intégré et adapté au contexte. En Guinée-Bissau, l’initiative Blue Bigajos soutient la cogestion des principales pêcheries dans les aires marines protégées tout en pilotant des structures communautaires de SCS. Le programme travaille en étroite collaboration avec les autorités nationales pour mettre en place des systèmes de données et renforcer les réseaux locaux de surveillance, le tout ancré dans les principes d’équité, de durabilité et de conservation de la biodiversité marine.

Vers une gouvernance maritime modernisée et résiliente

Ce pilote de drone à Madagascar pose les bases d’un système de contrôle des pêches plus intelligent et plus réactif. Il constitue également une étape importante dans un processus plus vaste : une évolution vers une architecture régionale de gouvernance marine modernisée et résiliente, capable de répondre aux menaces actuelles et de se préparer aux défis futurs.

Grâce à ses interventions ciblées, ses partenariats régionaux et son engagement à bâtir des institutions durables, GRID-Arendal contribue à façonner un avenir dans lequel les États côtiers peuvent affirmer leur contrôle sur leurs ressources maritimes, lutter contre la criminalité environnementale et offrir des avantages durables aux millions de personnes qui dépendent de l’océan.




Projet Adapt-WAP au Bénin : les écoliers et élèves à l’école de la préservation des écosystèmes transfrontaliers

Du 19 au 23 mai 2025, une vaste session de sensibilisation a mobilisé les écoliers et élèves des communes riveraines des parcs W et Pendjari dans le cadre de la mis en œuvre par le Centre National de Gestion des Réserves de Faune (CENAGREF) à travers le Ministère du Cadre de Vie et des Transports, en charge du Développement Durable. Huit communes au total ont accueilli la sensibilisation. Il s’agit des communes de Kandi, Banikoara, Malanville et Karimama pour le compte du département de l’Alibori et les communes de Matéri, Kérou, Kouandé et Tanguiéta pour le département de l’Atacora.

Photo d’ensemble apprenants
Photo d’ensemble apprenants

L’objectif est de sensibiliser les apprenants à savoir les écoliers et élèves des écoles établissements des communes autour des parcs Pendjari et W-Bénin a déclaré le Colonel Georges Sossou, Coordonnateur du projet. Il n’a pas manqué d’exprimer sa satisfaction face à la mobilisation des différentes parties prenantes.

Pour Alazi Tino, représentant du Directeur départemental des enseignements secondaire, technique et de la formation professionnelle de l’Alibori, la stratégie de sensibilisation auprès des jeunes est porteuse d’avenir. A le croire, trois raisons soutiennent cela : la période choisie, les cibles que sont les élèves et les différentes thématiques au centre de la sensibilisation. Il a exhorté tous les acteurs à pleinement jouer leur rôle pour l’atteinte des résultats durablement.

Même son de cloche dans l’Atacora, où Nahini Chabi-Boni, Inspecteur de l’Enseignement du Premier Degré et Directeur Départemental des Enseignements Maternel et Primaire, a mis en exergue la pertinence de l’approche pédagogique : « La méthode des supports et les illustrations utilisées sont d’une grande portée pédagogique. » Selon lui, le contenu est adapté aux niveaux des élèves et permet de toucher indirectement toute la communauté : « Les changements de comportement des écoliers et élèves vont impacter très rapidement et efficacement les parents d’élèves en particulier et, par ricochet, la communauté en général. » a-t-il laissé entendre.

Des modules pratiques et engageants

Trois thématiques majeures ont structuré cette session : la gestion des risques et catastrophes naturelles, la lutte contre le braconnage et la gestion des conflits, et la gestion durable des terres en lien avec l’adaptation aux changements climatiques. Ces modules ont été animés par les enseignants des différentes écoles concernées.

Pour Issa Bio Sounon, Directeur du Collège d’Enseignement Général de Goumori à Banikoara, le contexte s’y prêtait parfaitement : « Le milieu et le temps s’y prêtent. » Il reste convaincu que les notions acquises permettront aux élèves de jouer un rôle actif dans la gestion durable des ressources naturelles.

Le Chef division des ressources humaines, représentant le Directeur départemental de l’Enseignement maternel et primaire de l’Alibori, salue quant à lui l’initiative : « L’initiative est louable et son importance sur la vie n’est pas mesurable. Personnellement, j’ai appris beaucoup et je ne peux que souhaiter bon vent au projet. »

Les parents d’élèves à l’unisson

Du côté des associations de parents d’élèves, la mobilisation et l’enthousiasme sont tout aussi palpables. Bio Peregue Issa, de la Fédération départementale des associations des parents d’élèves et d’étudiants de l’Alibori, apprécie « l’approche de sensibilisation est innovante » et appelle à sa duplication dans d’autres localités.

Zakari Boukari, Président de la Fédération des associations de parents de l’Atacora, se réjouit de la participation massive observée de Matéri à Tanguiéta, en passant par Kérou et Kouandé. Il a expliqué : « Les enfants sont très contents d’avoir appris des pratiques simples et durables de gestion des terres comme la culture du muccuna, des pois d’angole, la rotation des cultures. Ils sauront transmettre les messages à leurs parents pour une prise de conscience collective ».

Une jeunesse motivée et bien informée

L’engouement des jeunes écoliers et élèves a été unanimement salué. Ouin-Ouro Claude, Chef du service de l’orientation scolaire et professionnelle de l’Atacora, note que la session interactive. Elle a permis selon lui que les élèves aient une meilleure compréhension des enjeux liés aux deux parcs. « A titre illustratif, les écoliers et élèves ont découvert et compris ce qu’est le système d’alerte précoce, les risques que comporte l’utilisation intensive des herbicides et les mesures d’adaptation aux changements climatiques. » a-t-il ajouté.

Même les plus jeunes ont manifesté leurs impressions.. Bakari et Mariam, tous deux en classe de CM1 à l’École primaire publique de Wantéou (commune de Matéri), se disent fiers d’avoir acquis des connaissances utiles pour préserver les ressources du parc. Ils promettent de partager ces leçons avec leurs parents pour encourager des comportements plus respectueux de l’environnement.

Au total huit-cent trente-trois (839) personnes de huit communes riveraines des parcs W et pendjari ont bénéficié et contribué à cette session de sensibilisation dont en grande majorité les écoliers et élèves.

Il convient de rappeler que cette initiative s’inscrit dans la continuité d’une formation tenue du 15 au 19 août 2022, à l’attention des enseignants des zones concernées.

Venance Ayébo TOSSOUKPE & Megan Valère SOSSOU




Amélioration de la nutrition à travers l’augmentation des rendements agricoles : le projet CASCADE change les pratiques de production des communautés béninoises.

A Tanguiéta dans le département de l’Atacora, les acteurs de la filière riz ont désormais de quoi se réjouir. Avec l’introduction de nouvelles techniques et outils propres à l’approche Farmers Field Business School (FFBS), les estimations en termes de tonnage ont largement augmenté grâce au projet CASCADE;. Plus de quatre (04) tonnes à l’hectare au cours de la campagne 2024 contre deux (02) tonnes par le passé.

Champ d’expérimentation de l’approche FFBS de la coopérative des producteurs de riz de Sonta, commune de Tanguiéta

L’Atacora est l’un des départements d’intervention du projet CASCADE, réputé pour la production du riz local. Ce riz riche en nutriments et prisé par les populations, est devenu de plus en plus rare sur le marché. Cet état de chose est dû aux facteurs tels que les variations climatiques et les techniques de production désuètes. Avec l’avènement du projet CASCADE, le secteur rizicole dans l’Atacora renait de ses cendres, avec l’approche FFBS. Farmers Field Business School (FFBS) est une approche d’apprentissage par la pratique qui intègre  pratiques d’agriculture durable, engagement sur le marché, genre, sécurité alimentaire et nutritionnelle, autonomisation des groupes vulnérables ainsi que le suivi et l’évaluation.

En 2024, la coopérative villageoise des producteurs de riz du village Sonta a adopté l’approche FFBS avec la mise en application de ses outils et techniques. Selon Pascaline KOUENE, secrétaire de la coopérative « cette première expérience est très positive. Les membres de notre coopérative sont satisfaits parce que nous avons augmenté le rendement et notre bien-être grâce à l’approche FFBS du projet CASCADE ».

Placée au cœur de tous les efforts, l’amélioration de la nutrition des femmes en âge de procréer et des enfants de 0 à 10 ans, est l’objectif principal poursuivi par le projet CASCADE. Par le passé, les producteurs ont tendance à brader presque toute leur production et faire face à des pénuries en période de soudure. Mais le projet CASCADE prône la priorisation de la consommation des produits par le producteur lui-même et la conservation d’une part pour la vente à un meilleur prix sur le marché. Pascaline KOUENE et sa coopérative ont pris conscience de cette nécessité et témoignent : « Les partenaires du projet CASCADE nous ont longtemps sensibilisé sur la nécessité pour nous de manger le riz que nous produisons au lieu d’aller tout vendre au marché à vil prix. D’ailleurs notre riz est de très bonne qualité et nous et nos familles devons en consommer ».

« La mise en œuvre de l’approche FFBS est une expérience réussie pour le projet CASCADE. Elle permet de regrouper les femmes autour du concret tout en renforçant leur capacité à mieux produire, à mieux vendre et à s’auto-suffire » témoigne Fiacre ALLADAYE, Chargé de projet CASCADE au sein de l’ONG ERAD, partenaire de CARE Bénin/Togo dans la mise en œuvre du projet. Des hommes bien outillés pour une meilleure applicabilité des principes de l’approche qu’a introduit le projet CASCADE, mais c’est aussi une synergie bien structurée entre différents acteurs de la filière : « Nous avons mis en place un dispositif de pérennisation qui regroupe tous les acteurs à savoir : la DDAEP, l’ATDA/CCeC, les structures agréées en conseil agricole, les producteurs et les bénéficiaires qui sont les groupements de femmes…En dehors de cette organisation technique, le projet CASCADE a également mis à la disposition des unités de démonstration (UD), tous les intrants agricoles nécessaires à la production. Toutes les activités notamment l’application des innovations, le déroulement des modules de formation et la définition des stratégies de réplication de l’approche, se sont déroulées sous le leadership des responsables de la DDAEP Atacora, de l’ATDA Pôle 3 et de ERAD ONG » a rajouté le Chargé de projet à ERAD ONG.

Pour bien se nourrir, la disponibilité des aliments est l’un des piliers importants. Renforcer ce pilier de la sécurité alimentaire, est devenu un défi important pour l’équipe du projet CASCADE. C’est ce qui fonde les partenariats avec les structures gouvernementales comme l’Agences territoriales de Développement Agricole (ATDA). Au sein de cette structure, les résultats obtenus à travers l’approche FFBS témoignent de la qualité de la synergie d’action. Selon Taofik TAPE BATTA, Chef de la Cellule Communale de Tanguiéta, l’approche FFBS est une approche innovante que l’ATDA a découverte. Il témoigne : « Nous sommes satisfaits par rapport aux résultats obtenus. Dans la zone, l’état des lieux montrait un rendement moyen qui tournait autour de deux (02) tonnes à l’hectare. Et lorsqu’on a mis en œuvre cette approche au niveau de la parcelle vulgarisée, nous sommes allés à quatre (04) tonnes à l’hectare. »

L’approche FFBS a été également appliquée dans d’autres communes du Bénin. A Nikki dans le Borgou et à Toviklin dans le Couffo, plusieurs groupements ont appliqué les techniques de cette approche, avec des résultats positifs enregistrés dans la production des fruits et légumes, de même que la production du niébé.

L’adoption des approches innovantes en termes de production agricole par les communautés leur ouvre ainsi les portes sur un avenir plus prometteur en termes de disponibilité alimentaire pour l’amélioration de la nutrition au sein des ménages Béninois. Chaque ménage s’engage donc à dupliquer l’approche pour la disponibilité alimentaire.

Bamidélé LAOUROU




COP16 Bis à Rome : une feuille de route adoptée pour le financement de la biodiversité

Les États ont trouvé un accord sur une feuille de route pour mobiliser les financements nécessaires à la protection de la biodiversité, avec un accent particulier sur les transferts de fonds entre pays du Nord et du Sud. La Conférence des Parties sur la biodiversité (COP16) avait débuté en octobre 2024 à Cali, en Colombie. Toutefois, les discussions avaient été suspendues faute d’accord sur une question clé : le financement. C’est donc à Rome, du 25 au 27 février 2025, que les négociations ont repris. Après d’intenses débats, un accord a finalement été trouvé, traçant la voie vers une meilleure mobilisation des ressources pour préserver la biodiversité mondiale.

La Cop 16 a commencé à Cali (Colombie), du 21 octobre au 2 novembre 2024. Crédits : UN Biodiversity

Le continent africain, riche en biodiversité mais vulnérable face aux défis environnementaux, est au cœur des discussions sur le financement. Lors de la COP15 en 2022, les États avaient convenu de mobiliser 200 milliards de dollars pour la protection de la biodiversité d’ici 2030. Parmi ces fonds, 30 milliards de dollars doivent être transférés chaque année des pays riches vers les pays en développement.

Cependant, un désaccord persistait : comment organiser ces transferts ? Les pays en développement, dont plusieurs en Afrique, plaidaient pour la création d’un nouveau fonds dédié. À l’inverse, les pays développés préféraient utiliser les structures existantes, estimant qu’il y avait déjà trop de mécanismes de financement fragmentés. Finalement, la question a été reportée à 2028, lors de la COP18. D’ici là, l’argent pourra transiter par plusieurs canaux, mais l’Afrique devra veiller à ce que ses besoins spécifiques ne soient pas oubliés.

De belles promesses, mais encore peu d’actes concrets

L’accord de Rome a été accueilli avec un mélange d’espoir et de scepticisme. « Nous avons maintenant une feuille de route, mais il faut des engagements concrets, de l’argent sur la table », a commenté An Lambrechts, représentante de Greenpeace International.

Ce sentiment est partagé par de nombreux observateurs en Afrique. En effet, la biodiversité africaine est menacée par la déforestation, l’exploitation minière et le changement climatique, mais les financements internationaux tardent souvent à arriver sur le terrain. Plusieurs pays du Sud exigent donc que les promesses se traduisent en actions concrètes, notamment à travers un accès simplifié aux fonds et une transparence accrue.

Laura Caicedo, de Greenpeace Colombie, rappelle que l’accord de Rome est un signal positif, mais insiste : « Les pays du Nord doivent maintenant tenir parole et débloquer des fonds réels pour protéger la biodiversité en Afrique, en Amérique latine et dans le monde. »

Si certains saluent cet accord comme une victoire, d’autres le voient comme une manœuvre politique pour éviter une crise de confiance entre pays du Nord et du Sud. Agnès Pannier-Runacher, ministre française de la Transition écologique, s’est félicitée que le texte n’ait pas créé un nouveau fonds. Pourtant, de nombreux pays africains estiment qu’une structure spécifique leur permettra de mieux accéder aux financements et d’éviter que l’argent soit dilué dans des mécanismes trop complexes.

Et maintenant ? Quels impacts pour l’Afrique ?

L’accord prévoit plusieurs étapes avant la COP18 en 2028. Il s’agit d’identifier les obstacles au financement de la biodiversité, afin de lever les freins administratifs et politiques. Mobiliser toutes les sources de financement disponibles, qu’elles soient publiques ou privées, nationales ou internationales. Faciliter le dialogue entre les ministres de l’environnement et des finances, un point clé pour éviter que la biodiversité ne soit reléguée au second plan dans les budgets des États.

Par ailleurs, deux autres décisions importantes ont été prises lors de cette COP16 bis : Des indicateurs de suivi pour l’accord de Kunming-Montréal ont été adoptés. Cet accord vise notamment à protéger 30 % des terres et des océans d’ici 2030.

Le lancement officiel du Fonds Cali. Ce fonds doit permettre de partager les bénéfices des entreprises qui utilisent des informations issues du séquençage du patrimoine génétique mondial. Cependant, il reste pour l’instant… vide.

L’Afrique doit rester vigilante

Le processus est donc en marche, mais l’Afrique doit s’assurer que ces décisions ne restent pas de simples déclarations. Avec ses forêts, ses savanes, ses mangroves et sa faune exceptionnelle, le continent est un maillon essentiel de la biodiversité mondiale. Pourtant, il ne reçoit qu’une part infime des financements disponibles.

La mobilisation de la société civile africaine sera donc cruciale pour suivre les engagements pris et exiger des résultats concrets. Sans financements adéquats, la protection des écosystèmes africains reste un vœu pieux.

Megan Valère SOSSOU




Projet AQSAEP : Les Jardins de l’Espoir œuvre pour une charte des bonnes pratiques agroécologique au Bénin

Dans le cadre de la mise en œuvre du projet Assurance Qualité et Maîtrise Financière des Systèmes d’Agroécologie Paysanne de la fourche à la fourchette (AQSAEP), les Jardins de l’Espoir a organisé un atelier de présentation d’étude diagnostique et validation de la charte AQSAEP à  Ouidah.

Financé par le Global Greengrants Fund (GGF) sur recommandation du Agroecology Fund (AEF), ce projet vise à garantir aux consommateurs, ainsi qu’aux producteurs, une production et une consommation saine et durable.

Les détails sont à retrouver dans ce reportage de Venance Ayébo TOSSOUKPE




Projet AQSAEP : une charte des bonnes pratiques pour guider l’Agroécologie au Bénin

Dans le cadre de la mise en œuvre du projet Assurance Qualité et Maîtrise Financière des Systèmes d’Agroécologie Paysanne de la fourche à la fourchette (AQSAEP), les Jardins de l’Espoir a organisé un atelier de présentation d’étude diagnostique et validation de la charte AQSAEP à Ouidah.

Financé par le Global Greengrants Fund (GGF) sur recommandation du Agroecology Fund (AEF), ce projet vise à garantir aux consommateurs, ainsi qu’aux producteurs, une production et une consommation saine et durable.

L’atelier a réuni plusieurs acteurs de l’agroécologie, notamment des agricultrices des communes du département de l’Atlantique. Selon Noël Obognon, Directeur Exécutif de Les Jardins de l’Espoir, l’accès au marché et la qualité des produits restent des défis majeurs pour les producteurs agroécologiques. C’est pourquoi a-t-il confié, des études diagnostiques  ont été réalisées pour cartographier les acteurs agro écologique et identifier les pratiques existantes.

Dans la continuité de ces travaux, l’atelier a également permis de présenter la charte des pratiques agroécologiques, élaborée pour guider les agriculteurs vers des méthodes durables. « Dans le cadre de ce projet Assurance Qualité et Maîtrise Financière des Systèmes d’Agroécologie Paysanne, nous avons formé 100 femmes en majorité des filles mères vulnérables mais nous pensons que ce n’est pas suffisant. Nous avons constaté que les femmes sont déterminées à respecter les itinéraires techniques agro écologiques. » a-t-il expliqué.

Un référentiel technico-économique pour structurer le secteur

L’un des résultats majeurs du projet est l’élaboration d’une étude référentielle technico-économique pour la mise en valeur agroécologique d’une parcelle sur une année. Ce document, présenté lors de l’atelier, détaille les mesures techniques et économiques nécessaires à l’exploitation réussie d’une ferme agroécologique. 

Pour Jaurès Monkoun, Ingénieur Agronome et Chargé de l’étude diagnostique sur les pratiques agroécologiques au Bénin dans le cadre du projet AQSAEP, l’étude a été menée sur toute l’étendue du territoire national. « Nous avons parcouru les sept (07) pôles de développement agricole et documenté les pratiques agricoles en fonction des zone et des facteurs sociologiques » a-t-il déclaré avant d’inviter tous les acteurs à multiplier la sensibilisation afin que l’agroécologie soit une réalité.

La contribution de ce référentiel est unique et novatrice en ce sens qu’il permettra aux agriculteurs de s’inspirer de son contenu pour développer et valoriser leurs cultures a affirmé Moukaila Bagui Bouraima, consultant de l’étude et ingénieur agronome spécialisé en agroécologie et protection des cultures. Un avis partagé par Pierre Bédié, Président de la Fédération Agroécologique du Bénin (FAEB). Ce projet est intéressant, car il documente les réalités du terrain. Il révèle les défis et les perspectives de l’agroécologie au Bénin. Pour consolider ces acquis, il est impératif selon Pierre Bédié de continuer à accompagner les acteurs et le soutien du gouvernement au mouvement agro écologique.

Parlant de la charte, Jaurès Monkoun en charge de sa rédaction pense qu’elle constitue un outil d’orientation qui permettra de former les acteurs intervenant dans les chaines de valeur agricole. A l’en croire, cette charte vient répondre à des exigences en matière de qualité des produits agroécologiques.

De son côté, Charles Nfotta, de l’ONG Culture Éducation et Recherche pour le Développement au Bénin, estime que la charte des pratiques agroécologiques élaborée dans le cadre de ce projet constitue une avancée importante. Elle permettra de réguler le secteur et de mieux identifier les véritables praticiens de l’agroécologie a-t-il justifié.

« Il y a un bon travail qui a été fait par Les Jardins de L’Espoir, les résultats présentés démontrent qu’un travail formidable a été fait. Les contributions des uns et des autres permettront de les améliorer » a déclaré Germain Dossou, expert en agroécologie et Coordonnateur de l’Association Nationale des Femmes Agricultrices du Bénin. C’est pourquoi à l’en croire, l’initiative peut être étendu à d’autres communes du Bénin et même au-delà. Il invite chaque acteur à mettre en application tout ce qui a été mis au point comme mesure agro écologique, à contribuer à la sécurité alimentaire du Bénin.

La reconnaissance des efforts fournis par les producteurs passe aussi par la certification des produits agroécologiques, un enjeu capital selon Bertrand Yehouenou, Président de AMARRE Bénin et membre du Cadre National de Concertation de l’Agroécologie pour la Convergence Globale. « C’est un projet qui vient régler le problème lié à l’identification des acteurs de l’agro écologie et leurs pratiques. Dans un contexte lié au changement climatique, les agriculteurs doivent revenir aux pratiques anciennes qui ne sont rien d’autres que les pratiques agro écologiques. Ces pratiques sont  résilientes aux changements climatiques et la certification des produits issus de ces pratiques va permettre d’assurer leur compétitivité sur le marché. »

Les agricultrices en première ligne du changement

Les bénéficiaires du projet en témoignent également. Gisèle Gnanssounougué, agricultrice bénéficiaire à Tori, se réjouit. « Depuis que Les Jardins de l’Espoir nous accompagne, nos pratiques s’améliorent. Ils nous ont fourni du matériel et des équipements. Notre principal défi reste l’accès à l’eau, mais nous comptons pérenniser les connaissances acquises au sein de nos coopératives. » Même constat pour Kantchemè Claudine, bénéficiaire à Ouidah : « Nous cultivons désormais des légumes sans intrants chimiques. Nos produits sont sains et contribuent à préserver la santé des consommateurs tout en augmentant nos revenus. Tout ceci grâce au projet de Les Jardins de  l’Espoir. »

Comme Gisèle et Claudine, Houeze Pauline venue de So Ava est mieux aguerrie sur les bonnes pratiques agro écologiques. Elle témoigne. « Mes cultures se développent naturellement. J’ai constaté une croissance de la productivité au niveau de mes cultures. Désormais, nos consommateurs sont fidèles à nos produits et savent que les produits agroécologiques ne sont pas nuisibles. »

Face à ces résultats encourageants, Hubert Dognon Tchoukpéni, ancien Directeur départemental de l’Agriculture, de l’Élevage et de la Pêche, salue l’initiative de Les Jardins de l’Espoir tout en appelant l’État à soutenir davantage la production et l’accessibilité des engrais biologiques.

Une visite de terrain pour mesurer les avancées du projet

L’atelier s’est achevé par une visite de terrain menée par une équipe d’experts agronomes dans les fermes témoins du projet. Ce parcours, qui a débuté à Ouidah avant de passer par Tori, Allada et So-Ava pour s’achever à Godomey Togoudo, a permis d’évaluer concrètement l’impact du projet sur les exploitations agricoles. Du compost fabriqué sur place avec les bouses de vaches et les digestions des caprins et plusieurs autres techniques agro écologiques ont été touchées du doigt par les visiteurs émus du grand travail  effectué.

Cette visite qui constitue la dernière étape des activités du projet AQSAEP, ouvre également la voie à une meilleure structuration du secteur agroécologique au Bénin. Grâce aux efforts de Les Jardins de l’Espoir et de ses partenaires, une dynamique durable se met en place pour favoriser une agriculture respectueuse de l’environnement et économiquement viable, notamment pour les femmes productrices.

Rappelons que plusieurs ateliers avaient été organisés en prélude à la validation de cette charte qui permettra de guider les pas des populations en particuliers des agriculteurs et agricultrices dans l’agroécologie au Bénin.

Mahugnon Josué TCHAGNONSI




Les Jardins de l’Espoir outille les femmes à la logistique agricole et aux normes qualité agro écologique

Dans le cadre de ses projets « Assurance qualité et maîtrise financière des systèmes agroécologiques paysans » (AQSAEP) et Promotion des Pratiques AgroEcologiques (ProPAE), l’ONG Les Jardins de l’Espoir a organisé une formation du 7 au 9 janvier 2025 au profit des femmes des communes de Tori – Bossito, de So – Ava, d’Abomey – Calavi, de Ouidah et de Sèmè – Kpodji.

Formation à la gestion de la logistique agricole

S’adressant principalement aux femmes, aux jeunes filles mères et aux femmes vulnérables du département de l’Atlantique, ce projet place la femme au cœur de ses activités. « Les femmes jouent un rôle important dans l’alimentation des ménages. Elles ont besoin d’être mieux outillées pour augmenter leurs revenus et devenir autonomes financièrement », a expliqué la présidente de Les Jardins de l’Espoir, Raoudath Bouraima. Elle a souligné que cette formation s’inscrit dans le cadre d’une série d’ateliers destinés à promouvoir l’agroécologie, gage d’une bonne santé et d’un environnement sain.

Cet atelier de formation était axé sur la gestion logistique des produits issus des fermes agroécologiques, de la production à la vente.

Avec une approche basée sur la participation interactive, les différents formateurs ont su susciter l’intérêt des femmes et maintenir leur implication tout au long des trois jours.

Marthe Kinigbé est une participante à la formation. Elle déclare « C’est une excellente initiative. Produire, c’est bien, mais savoir conserver est important pour éviter les pertes. Grâce à cette formation, je suis mieux préparée pour préserver mes produits et les commercialiser efficacement. »

Une initiative qui change la donne

« Ces formations nous permettent d’éviter les pertes post-récolte et d’augmenter nos revenus. Par exemple, moi je plante de la patate douce sans la mettre sous terre, et je produis des engrais naturels en plus. Je compte appliquer les connaissances acquises dans mes activités pour rentabiliser. Je remercie Les Jardins de l’Espoir et ses partenaires pour cet appui, » a souligné Agballia Yolande, venue de la commune de Ouidah.

Du côté des formateurs, l’approche pédagogique a été pensée pour maximiser l’engagement et l’apprentissage des participantes.

Pour le formateur Serge Koutchoro, spécialiste en renforcement des capacités et conservation sociale, cette formation contribue à l’atteinte des objectifs du développement durable. Il s’est agi d’amener les femmes à changer leurs approches en matière de collecte, stockage et conservation des produits pour une meilleure valorisation sur le marché.

L’autre volet de l’atelier, assuré par la formatrice Ezéchielle Bouet Kouanou, ingénieure en contrôle qualité des aliments et produits de santé, a porté sur les normes de qualité agroécologique des produits et les méthodes de conservation.

À ce niveau, les participantes ont appris plusieurs techniques, notamment l’entreposage des produits, l’accès aux clients, ainsi que l’essentiel à maîtriser avant, pendant une récolte et au cours de l’acheminement vers les consommateurs.

Un suivi de terrain pour pérenniser les acquis

Au-delà de la formation, le projet AQSAEP prévoit un accompagnement continu pour s’assurer de l’application des connaissances sur le terrain. Des animateurs de terrain sont chargés de ce suivi.

Nicherolle Larissa Aissi, est animatrice à Tori-Bossito. Elle se réjouit : « Les échanges ont été interactifs et les femmes se sont montrées très motivées à appliquer les connaissances acquises. »

Vue d’ensemble des participantes

Les Jardins de l’Espoir n’attend pas moins des bénéficiaires. « Nous attendons que les bénéficiaires non seulement maîtrisent la logistique agricole et le mécanisme de stockage et de conservation, mais aussi le transport des produits vers le marché fermier pour une meilleure valorisation des efforts consentis, » a laissé entendre Noël Obognon, Directeur exécutif de Les Jardins de l’Espoir.

« Depuis quelques mois, nous bénéficions d’un accompagnement précieux. Je partage ces nouvelles connaissances avec mes collègues et espère voir ces sessions devenir permanentes, » a confié Houézé Pauline, saluant la qualité des formations.

Comme elle, Jeannette Anoumou et Donatienne Dansou, venues de So-Ava, ont également témoigné de l’efficacité de la formation. Pour les différents acteurs, les trois jours d’atelier ont eu le mérite de combler les attentes.

Avec le soutien continu de ses partenaires, Les Jardins de l’Espoir, à travers ce projet, amorce la transformation des systèmes agricoles traditionnels en des modèles résilients, durables et équitables. Il promeut une agroécologie inclusive, respectueuse de la santé et de l’environnement, tout en contribuant à l’autonomisation des femmes rurales. Pour rappel, cet atelier de formation a été effectif grâce à Agroecology Fund et  SUCCO à travers le projet ProPAE.

Edwige B. BINAZON




Menace sur une aire marine protégée au Bénin : Un député au cœur de la controverse

Malgré l’existence de dispositifs légaux visant à protéger les ressources marines, notamment le décret 003-2022 du 05 janvier 2022 portant création des aires marines protégées de Donaten et de la Bouche du Roy en République du Bénin, une affaire suscite une vive indignation dans les localités de Hiyo et Hounmanse.

Un député est accusé d’avoir acquis 24 hectares de mangrove dans une aire marine protégée (AMP), un espace pourtant classé comme patrimoine naturel à préserver. Selon les informations recueillies, le député aurait acheté ces terres à des individus ne disposant d’aucun titre légal de propriété sur cette zone. Située sur un bras de la lagune côtière, au cœur de l’AMP, cette transaction aurait été conclue pour une somme dont une grande partie aurait déjà été versée. Il s’agit d’un projet d’extraction de sable dans l’aire marine protégée.

Carte AMP Bouche du Roy

Une communauté indignée

La mangrove, essentielle pour la biodiversité et la lutte contre les changements climatiques, est protégée par des lois nationales et internationales. Cette vente illégale constitue une violation flagrante du décret 003-2022, qui interdit toute exploitation ou appropriation privée des aires marines protégées.

Au cours d’une audience publique tenue le samedi 4 janvier 2025, les populations locales ont exprimé une opposition catégorique à cette transaction. Habitants, pêcheurs, et défenseurs de l’environnement se sont mobilisés pour dénoncer cet acte qu’ils qualifient de pillage environnemental.

Les populations demandent à rencontrer le promoteur pour exiger des explications. Une résolution qui unanime appelle à l’annulation immédiate de la transaction et à des sanctions à l’encontre des auteurs de cette vente illégale.

Un enjeu environnemental et juridique majeur

Cette affaire témoigne des défis persistants liés à la protection des écosystèmes fragiles au Bénin. Les aires marines protégées, notamment les mangroves, jouent un rôle crucial dans la régulation du climat, la préservation de la biodiversité et la protection des moyens de subsistance des communautés locales.

Selon des experts environnementaux, si cette transaction est entérinée, elle pourrait ouvrir la voie à d’autres violations et menacer la survie de cet écosystème vital.

Face à cette situation, les organisations de la société civile et les défenseurs de l’environnement appellent à une enquête urgente pour faire la lumière sur cette affaire. La restauration intégrale des terres à l’état naturel et l’application stricte des dispositions du décret 003-2022.

Megan Valère SOSSOU




Protection de l’environnement et numérique : le casse-tête des déchets électroniques

L’essor du numérique et la digitalisation des activités humaines nécessitent des équipements devenus indispensables ; mais, usés, ces équipements deviennent d’énormes déchets souvent mal gérés.

Des plaquettes d’équipements électroniques

« Quand mon ancien téléphone s’est arrêté de fonctionner, je ne savais pas où le jeter. Aucun point de collecte n’était disponible dans mon quartier. Je l’ai gardé à la maison, comme beaucoup de gens le font ici », raconte Serge Toassegnitche, Directeur d’école primaire à Zakpota. Comme lui, des milliers de Béninois se retrouvent confrontés à un dilemme lorsqu’un appareil électronique arrive en fin de vie.

 Selon le rapport Global E-waste Monitor en 2020, 53,6 millions de tonnes de déchets électroniques ont été produites à l’échelle mondiale en 2019. Le Bénin quant à lui, a généré 9 200 tonnes de déchets électroniques la même année. Ces déchets d’équipements électriques et électroniques représentent le flux de déchets solides qui connaît la croissance la plus rapide au monde en raison du développement numérique.

Ces déchets d’équipements électriques et électroniques générés au Bénin constituent une menace silencieuse selon Géraud Koudakpo, spécialiste de l’assainissement à l’ONG Save Our Planet. « Ces déchets, classés comme ‘’déchets chimiques’’, contiennent des substances toxiques comme le plomb et le cadmium, qui, une fois libérées dans la nature, contaminent les sols, les eaux et l’air », a-t-il déclaré.

Face à ces constats inquiétants, certains acteurs, tant privés que citoyens, commencent à prendre des initiatives pour limiter les impacts de ces déchets.

Responsabilités sociétales et citoyennes

En 2021 à Cotonou, l’Entreprise Ericsson et le réseau de téléphonie mobile MTN Bénin se sont associés pour recycler les équipements électroniques et électriques en fin de vie, dans le cadre d’une initiative dénommé Ericsson Product Take-Back Program. Une collaboration qui a permis la collecte, la mise hors service, le transport et le recyclage de plus de 123 tonnes métriques de déchets d’équipements électriques et électroniques. « Chez MTN, nous croyons aux bienfaits d’une planète saine et nous nous sommes engagés à atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2040. Nous reconnaissons notre devoir d’atténuer les effets négatifs du changement climatique et de soutenir la préservation de l’environnement… », avait déclaré, Uche OFODILE, PDG de MTN Bénin dans un communiqué de presse.

À Porto-Novo, des jeunes réunis au sein de l’ONG Voix et Actions Citoyennes organisent des campagnes de sensibilisation et des ateliers pour une meilleure gestion des déchets d’équipements électriques et électroniques. Elias Guivi est l’un d’entre-deux. Il est activiste pour l’économie circulaire. « Nous avons initié Blodothon qui signifie littéralement Marathon de réparation. Un atelier collaboratif qui promeut la réparation, la customisation des déchets d’équipements électriques et électroniques… » a-t-il confié.

En l’espace d’une année, plus de 30 ateliers collaboratifs ont été organisés avec à la clé des centaines d’équipements électroniques réparés. Près de 500 apprenants appartenant à plus de 20 groupes pédagogiques ont été sensibilisés à l’utilisation durable des appareils électriques et électroniques.

Des initiatives louables mais qui restent insuffisantes face au défi que posent ces déchets au quotidien pour de nombreux acteurs du secteur.

 « Après plusieurs réparations, beaucoup de clients préfèrent acheter de nouveaux téléphones et abandonnent parfois les anciens chez moi. Voici, je me retrouve avec de plus en plus de déchets électroniques », raconte Yves Atonhonton, Maintenancier électronique à Bohicon.

C’est pourquoi, Sahoudatou Orèdola PIO, Juriste spécialiste de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) pense que les entreprises qui fournissent des équipements électriques et électroniques doivent collaborer avec les entreprises de réparation pour une meilleure gestion des déchets. Cependant, les efforts des entreprises et des initiatives citoyennes ne suffisent pas à eux seuls. L’Etat a un grand rôle de veille à jouer.

Responsabilité de l’Etat

Le Ministère du cadre de Vie, des transports en charge du développement durable à travers la Direction Générale du Climat et de l’Environnement (DGEC) multiplie les séances de sensibilisation à l’endroit des acteurs locaux sur l’utilisation de ces déchets.

Dans le même temps, la loi n° 2017-20 portant code du numérique en République du Bénin en son Article 32 oblige tout équipementier, opérateur, importateur et distributeur à respecter les normes environnementales. « Le Bénin ne dispose pas d’une politique claire sur la gestion des déchets électriques et électroniques. Ce manque d’encadrement pousse les utilisateurs et fournisseurs de services à adopter des méthodes d’élimination inappropriées avec des conséquences sur la santé communautaire et l’environnement. », déplore la spécialiste RSE.

Pourtant, au plan international le Bénin est signataire de plusieurs conventions sur les déchets électriques et électroniques reconnus comme dangereux. Il s’agit des conventions de Rotterdam, de Bamako, de Stockholm et de Bâle.

Pulchérie Donoumassou Simeon, Point Focal de la Convention de Bâle au Bénin à la DGEC, pense que les défis sont encore nombreux et entiers en ce qui concerne les méthodes de gestion des déchets électriques et électroniques au Bénin.

« Il n’existe pas encore de procédure formellement établie par les textes… mais il serait très important que l’Etat mette en place une procédure en termes d’accompagnement des personnes qui importent ces équipements. » Il y va de la santé des populations et de la protection de l’environnement a-t-elle indiqué.

Dans le cadre de la formalisation du secteur, il est envisagé le recensement des acteurs et la coordination des importations des équipements électriques et électroniques a-t-elle expliqué en soulignant que les techniciens réparateurs seront des maillons essentiels.

Le Bénin dans son élan pour le développement numérique doit veiller aux impacts environnementaux. Il s’agira de développer des solutions pour gérer les déchets électroniques de manière responsable.

Pour y arriver, il est essentiel que les pouvoirs publics, les entreprises, et les citoyens s’unissent pour relever ensemble ce défi environnemental, sans quoi, la transition numérique ne peut être durable.

Cet article est rédigé dans le cadre de la bourse du Programme de journalisme sur les Infrastructures Publiques Numériques (IPN) de la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) en collaboration avec Co-Develop.

Megan Valère SOSSOU