Pêche Artisanale Maritime: Entre Subsistance et Durabilité des ressources marines au Bénin

La pêche artisanale maritime au Bénin est une source majeure de revenus pour les communautés côtières. Cependant, les défis liés à la durabilité des ressources marines et à la gestion efficace de cette activité se font ressentir.

Bénéficiant des eaux fertiles de l’océan Atlantique, le Bénin abrite un total de 47 sites de débarquement, où environ 4 305 pêcheurs artisans, en majorité de nationalité béninoise, exercent leur métier. C’est plus de 600 000 emplois directs ou indirects et contribuant à hauteur de 3,5% au PIB national.

Cependant, malgré une production totale de 74 000 tonnes en 2022, dont 75% proviennent de la pêche artisanale, un déficit de 146 000 tonnes persiste par rapport à une demande de 220 000 tonnes. Pour combler cet écart, les importations ont considérablement augmenté depuis 2008.

Ces chiffres témoignent non seulement de l’importance de ce secteur, mais aussi  révèlent des défis majeurs, notamment la menace de la surpêche, qui met en péril l’équilibre fragile des écosystèmes marins.

A Djeffa plage, Ahouandji en passant par Fonsa Pahou, Lokoué, Djondji, Zogbédji à Hilla Condji, les pêcheurs artisans sont de plus en plus conscients des enjeux de la pêche durable au Bénin.

C’est le cas du sieur K. Folly, pêcheur avec plus de deux décennies d’expérience. Il explique avec une grande préoccupation : « Lorsque nous nous aventurons sur les eaux, une préoccupation constante nous habite : quelle quantité et quelle qualité de poissons nos enfants hériteront-ils ? ». C’est pourquoi, il nous est arrivé de penser qu’il serait judicieux de laisser la mer en repos pendant au moins six mois avoue-t-il avant de soutenir que cette approche contribuerait à prévenir la surpêche en offrant aux poissons le temps de se reproduire avant d’être capturés.

Cependant, K. Folly fait part de la réalité complexe à laquelle les pêcheurs font face au quotidien. « La demande et le coût de la vie ne cessent d’augmenter, ce qui rend difficile la recherche d’activités alternatives capables de remplacer la pêche. Nous sommes contraints de continuer à travailler tout en ayant un œil sur la loi.»

Malgré les difficultés, il souligne l’engagement des pêcheurs à respecter les réglementations en vigueur. Cette perspective met en lumière les efforts constants déployés par les pêcheurs pour équilibrer leurs activités vitales avec la nécessité de préserver les ressources marines.

Il est indubitable que la pêche artisanale maritime au Bénin joue un rôle vital en tant que source de subsistance et élément clé de la richesse culturelle des communautés côtières. Cependant, comme sieur Folly, une gestion rigoureuse des ressources marines et une régulation appropriée s’avèrent indispensables pour garantir la durabilité de cette activité dans le pays.

Un œil sur la Loi-Cadre pour la Pêche et l’Aquaculture au Bénin

Bientôt dix ans que le Bénin a adopté une approche proactive pour préserver ses écosystèmes aquatiques et gérer durablement ses ressources halieutiques. Il s’agit de la Loi-cadre n° 2014-19 du 07 août 2014 relative à la pêche et à l’aquaculture en République du Bénin. Cette législation intègre des mesures essentielles de conservation pour le secteur de la pêche.

Dans le but de préserver les stocks halieutiques, l’article 73 de cette loi interdit strictement l’utilisation d’engins et de méthodes de pêche incompatibles. Les barrages à poissons, communément appelés « acadja », les engins coniques à contre-courant « dogbo », et les engins à poches multiples pour la capture de crevettes et crabes, les « gbagbaloulou », figurent parmi les méthodes proscrites.

L’article 78 exige une autorisation préalable pour l’introduction de nouveaux engins de pêche. La protection de la biodiversité aquatique est aussi soulignée par les articles 79 et 80, qui interdisent respectivement la pêche, la détention et la commercialisation de mammifères aquatiques et de tortues marines. Chose que K. Folly et ses collègues de Togbin ne cessent de se rappeler au cours de leurs différentes causeries.

Malgré leur besoin de vivre de la sueur de leur front, ils sont encouragés à respecter les dispositions règlementaires en particulier la loi-cadre de 2014 sur la pêche et l’aquaculture. Cette loi représente un fondement solide dans les efforts du Bénin pour garantir une pêche durable le long de ses côtes.

Megan Valère SOSSOU




Pêche durable au Bénin : CEMLAWS Africa et CCM à travers ECO BENIN renforcent les capacités des médias et des OSC

Dans le cadre de leur projet intitulé « Promouvoir les capacités locales pour faire face aux impacts déstabilisants des navires de pêche étrangers dans le golfe de Guinée et en Mauritanie », le Centre for Maritime Law and Security Africa (CEMLAWS Africa) et le Centre for Coastal Management (CCM) de l’Université de Cape Coast, en collaboration avec leur partenaire ECO BENIN, ont organisé un atelier de formation le 23 mai 2023 à Cotonou.

Il s’agit d’un programme de formation et de renforcement de capacités pour les médias, les Organisations de la Société Civile du secteur de la pêche et les acteurs communautaires sur les activités et les impacts des navires de pêche en haute mer.

Le Préfet maritime du Bénin, le capitaine de Verseau Fernand Maxime AHOYO en ouvrant officiellement l’atelier a déclaré « L’atelier que nous entamons représente une occasion unique de rassembler les acteurs clés les médias, les organisations de la société civile et les acteurs communautaires qui jouent un rôle crucial dans la sensibilisation, la mobilisation et la mise en œuvre des mesures concrètes pour lutter contre les effets déstabilisant de la pêche ».

C’est pourquoi, a-t-il souligné, cet atelier ne se limite pas à une rencontre ponctuelle mais qui marque un début de partenariat solide et durable. Il n’a pas manqué d’encourager les participants à établir des liens, à partager leurs expériences et à travailler ensemble pour assurer un avenir marin durable et plus efficace.

A noter que plusieurs présentations ont permis aux participants de mieux comprendre la situation actuelle de la pêche au Bénin et les défis auxquels elle est confrontée. Les sujets abordés comprenaient le secteur de la pêche artisanale et industrielle au Bénin, la gouvernance et la transparence dans le domaine de la pêche, le cadre juridique international régissant la pêche, ainsi qu’un aperçu de l’administration et de la gouvernance de la pêche au Bénin.

Parmi les défis du secteur de la pêche au Bénin, Herman Kasseau GANGBAZO, Chef du Service Aménagement et Gestion des Pêcheries à la Direction de la Production Halieutique, a souligné l’importance de mieux connaître les stocks de poissons, de lutter contre la pêche illicite (INDNR) et d’élaborer des plans d’aménagement et de gestion des pêcheries. Il a également souligné la nécessité d’améliorer le système de suivi statistique des pêches, de renforcer les capacités en matière de sécurité maritime, de surveiller les activités en mer, de contrôler l’accès aux pêcheries artisanales et d’immatriculer progressivement les embarcations.

Des participants engagés et mieux aguerris pour une pêche transparente et durable

Zéphirin AMEDOME est Secrétaire Général de l’Union Nationale des pêcheurs marins, artisans et assimilés du Bénin. Cet atelier est pertinent à l’en croire car il permet de mieux outiller et bien informer les pêcheurs et assimilés de Kraké à Hilacondji sur les réalités de la pêche afin de freiner la diminution des ressources.

Quant au rôle des médias, Cécile GOUDOU KPANGON, journaliste à l’Office de Radiodiffusion et de Télévision du Bénin (ORTB), a souligné la nécessité d’accéder à l’information et de la rendre disponible à tous les acteurs et à la population.

« Nos auditeurs, nos téléspectateurs et nos lecteurs ont besoin de savoir les ressources halieutiques dont dispose le Bénin, comment est-ce que le secteur se comporte ?, comment est-ce qu’on gère ces ressources ? » a-t-elle laissé entendre avant d’ajouter « c’est aussi un rôle de veille que nous avons à attirer l’attention des gouvernants sur les nécessités d’une meilleure gestion du secteur. »

Les participants à cet atelier ont acquis des compétences et une expertise en matière de lois sur la pêche, ainsi qu’une meilleure compréhension des impacts de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INDNR) et des activités des navires de pêche artisanale. Aux termes de l’atelier des attestations ont été décernées aux participants. Gauthier AMOUSSOU, Coordinateur de l’ONG ECO BENIN, a exprimé son espoir de voir les médias fournir des informations sur la pêche et inonder l’espace public avec ces informations.

Megan Valère SOSSOU