Saison sèche au Bénin: Les feux de végétation, un handicap pour la conservation de la biodiversité

« Quand nous mettons le feu dans la brousse, nous nous mettons aux aguets pour atteindre nos cibles » Roch K., mécanicien moto et chasseur à Zogbodomey. Comme Roch, ils sont nombreux ces jeunes et adolescents à s’adonner à la chasse sans limite au mépris des règles qui régissent l’exercice d’une telle activité devenue la cause incontournable des feux dans les milieux végétatifs.

Les feux de brousse, également connus sous le nom de feux de végétation ou de feux de forêt, sont des incendies qui se produisent dans les zones de végétation plus ou moins dense, telles que les forêts, les savanes et les prairies. Ils peuvent être causés par des facteurs naturels tels que la foudre, mais dans la plupart des cas, ils sont déclenchés par l’homme, soit intentionnellement ou par négligence. Lorsque les feux sont utilisés pour défricher des terres ou pour contrôler les mauvaises herbes, ils peuvent causer des grands incendies. Quelle que soit la cause, les feux de végétation ont un impact négatif sur la faune et la flore.

Dans la commune de Zogbodomey, département du Zou au centre Bénin, Roch et ses acolytes se donnent depuis plus de 10 ans et à chaque saison sèche à la chasse de jour comme de nuit. Bien qu’il ait son activité de mécanique moto, Roch ne se lâche pas d’exercer la chasse en plein temps pendant la saison sèche. Une activité rentable qui profite aux pratiquants, mais qui n’est pas sans conséquence sur la biodiversité.

Roch explique qu’en raison de la rareté des reptiles et rongeurs tant convoités, il est de plus en plus difficile que ces derniers soient pris aux pièges. Ainsi, la nouvelle trouvaille plus efficace, à l’en croire, est de raser l’espace avec du feu. « Les animaux d’aujourd’hui sont de plus en plus rusés. Ils échappent souvent aux pièges ou peuvent les emportés. Mais avec le feu, ils sont plus vulnérables » confie-t-il tout en se montrant insouciant des répercussions sur la biodiversité.

Ces feux de végétation provoqués sont à la base de la destruction des habitats naturels des animaux, tels que les forêts, les savanes et les prairies. Si les feux sont intenses et durables, ils peuvent causer des pertes permanentes de biodiversité en atteignant des espèces en voie de disparition.

Du feu pour une chasse déloyale

De nombreuses espèces animales sont tuées dans les feux ou fuient leur habitat et sont exposées à de nouveaux dangers, tels que les prédateurs ou les maladies. Les plantes sont également affectées par les feux de végétation, car elles sont détruites ou endommagées. Elles qui servent parfois aux soins médicinaux. Les feux de végétation perturbent également les écosystèmes et les cycles biologiques, ce qui engendre des répercussions à long terme sur la biodiversité.

La force du feu, Roch s’en souvient comme si c’était hier. Seulement, la saison sèche passée, il avait fait une grande moisson en mettant le feu à un milieu vierge dans les parages de Tanwe-Hessou. Il raconte « Plus d’une trentaine d’animaux de même espèce et d’espèce différentes étaient pris dans le piège du feu. C’est vrai que les forestiers nous surprennent par moment à travers des contrôles, mais il est de notre coutume de chasser dans la commune de Zogbodomey ».

A travers le monde d’importantes superficies riches en espèces animales et végétales sont en proie aux feux de végétation. Ces feux ont des conséquences graves sur l’environnement et la biodiversité. Ils entraînent également des pertes économiques et sociales importantes, telles que des pertes de récoltes et de moyens de subsistance pour les communautés locales.

En outre, les feux de végétation contribuent au changement climatique en libérant des quantités importantes de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Un fait qui dégrade l’état de la biodiversité, car le changement climatique cause des modifications des conditions climatiques qui sont difficiles pour certaines espèces à adapter.

Il est important de prendre des mesures pour prévenir les feux de végétation et protéger la biodiversité. Cela peut inclure la sensibilisation à l’importance de la prévention des feux de forêt, la mise en place de systèmes de gestion des incendies efficaces et la réglementation des activités qui peuvent causer des incendies de forêt. En agissant maintenant, nous pouvons protéger la biodiversité et préserver ces écosystèmes importants pour les générations à venir.

Megan Valère SOSSOU




Protection des espèces au Togo : des trafiquants d’ivoire condamnés

Trois trafiquants ont été jugés et condamnés vendredi 3 juin 2022, par la première chambre correctionnelle du Tribunal de 1ʳᵉ instance de Lomé pour trafic illicite et illégal de six défenses d’éléphants. Les trois trafiquants après avoir reconnu les faits à eux reprochés, ont écopé d’une peine d’emprisonnement de six mois dont quatre avec sursis. Ils paieront, en sus, une amende de deux cent mille francs CFA chacun pour flagrant délit de détention, de circulation et de la commercialisation illégale de produits fauniques.

Les trois trafiquants d’ivoire, AMEGNIGAN Raphaël, peintre auto, DOUTI Yendine, revendeur d’huile à moteur et ALASSANI Ibrahim, revendeur de pièces détachées de voiture, tous les trois de nationalité togolaise, sachant que vendre les défenses d’ivoire est un acte délictuel, ont soigneusement dissimulé les six défenses d’éléphants dans un sac sur une moto jusqu’au lieu de la transaction où ils avaient été arrêtés le 19 mai 2022.

Cette décision de justice, bien que conforme à la vision de collaboration entre le Ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières (MERF) et le réseau EAGLE-Togo qui s’active dans l’application des lois fauniques dans de nombreux Etats africains, reste faible, car le commerce illégal des espèces est un crime et une menace sérieuse qui doit être traitée sérieusement par les Etats Africains. Selon le Coordinateur Assistant d’EAGLE-Togo, les lois ne sont pas faites pour la forme, mais pour sévir afin de dissuader le moindre contrevenant. « Passer deux mois de prison ne décourage point un trafiquant d’ivoire. En clair, une telle décision ne saurait être dissuasive au point d’amener d’autres personnes à abandonner leur intention d’exercer une telle activité, Illicite aujourd’hui en lien avec des réseaux criminels organisés transnationaux », a-t-il indiqué.

Le trafic illicite auquel les trois complices ont tenté de se livrer, tombe sous le coup de l’article 796 du nouveau code pénal qui sanctionne toute personne qui fait circuler, vend, importe, exporte ou fait transiter les animaux sauvages, vivants, des trophées sans autorisation à une peine d’emprisonnement de un à six mois et d’une amende de cent mille à cinq cent mille francs CFA ou de l’une de ces deux peines. L’article 761 de ce même code sanctionne aussi, toute personne qui détruit ou fait le commerce direct ou indirect sans droit d’espèces animales ou végétales à une peine de un à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende d’un million à cinq millions de francs CFA, sans préjudice de toute autre disposition au code. Selon un agent des eaux et forêt en fonction dans la région Centrale, rencontré au Tribunal de Lomé, il faut une application stricte de loi contre les trafiquants d’espèces en voie d’extinction et il a ajouté : « Il est de bon ton que les trafiquants arrêtés soient punis avec rigueur et l’application effective de la loi par de fortes peines d’emprisonnement fermes, seul moyen de dissuader les trafiquants ou d’envoyer un message fort aux autres qui sont impliqués ou qui pourraient avoir l’intention de mener de telles activités illégales ».

Une espèce légalement protégée mais vulnérable

Rappelons que pour cette arrestation des trois trafiquants, c’est au moins trois éléphants qui ont été tués pour avoir les six défenses saisies. Le commerce international de l’ivoire est déclaré illégal depuis 1989. Mais, les populations d’éléphants d’Afrique continuent de décroître. Chaque année, 20.000 à 30.000 éléphants sont tués pour leurs ivoires, selon le Fonds mondial pour la nature (WWF) ; équivalent de 50 à 80 individus par jour.

L’espèce ne compte plus 415.000 pachydermes en Afrique, contre 3 à 5 millions au début du siècle dernier. D’après le rapport de 2016 sur le statut des éléphants africains, il resterait à peine 10.000 éléphants dans toute l’Afrique de l’Ouest, et environ 102 vivent actuellement au Togo, une population encore très fragile qui aura besoin de plusieurs années pour se reconstituer. Deux grands facteurs sont considérés comme étant la cause de cette baisse drastique de l’effectif des éléphants : d’une part, l’accroissement du trafic illégal d’animal lié à la forte demande internationale de l’ivoire. Ce trafic génère d’énormes profits illégaux pour des organisations criminelles complexes qui sont souvent responsables de l’abattage des éléphants. D’autre part, l’exploitation abusive des ressources naturelles nécessaires aux éléphants du fait de l’agriculture industrielle et des occupations anarchiques de leur habitat. Le commerce illégal de défenses d’éléphant est malheureusement en constante augmentation et pèse trois milliards de dollars américains (soit près de 2.000 milliards de francs CFA) par an avec pour principal marché l’Asie du Sud-est, avec, notamment, la Chine et le Vietnam comme principaux acheteurs.

Nicolas K. ADIGBLI (Le Nouvelliste)