Le secrétariat de la convention sur la diversité biologique dévoile le projet officiel de nouveau cadre mondial pour la biodiversité post-2020. Il doit être examiné par les 196 parties lors de la COP 15 cet automne.
Le projet de cadre mondial pour l’après 2020 prévoit de réduire de moitié le risque d’extinction dans tous les groupes taxonomiques et fonctionnels.
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Aucun des vingt objectifs que la communauté internationale s’était fixés en 2010 en matière de biodiversité n’a été atteint en 2020. Fera-t-elle mieux pour la décennie qui suit ? C’est tout l’enjeu qui pèsera sur les épaules des 196 États, participant à la convention sur la diversité biologique (CDB) après la 15e conférence (COP 15) qui doit se tenir du 11 au 24 octobre 2021 à Kunming (Chine).
Durant cette conférence, ces derniers devront se mettre d’accord sur de nouveaux objectifs. Le secrétariat de la CDB a dévoilé ce lundi 12 juillet le premier projet de cadre mondial(1), qui contient ces objectifs en vue de gérer la nature jusqu’en 2030.
Protéger 30 % des zones terrestres et maritimes
Ce programme fixe 21 objectifs pour 2030. Parmi ceux-ci figurent la protection d’au moins 30 % des zones terrestres et maritimes dans le monde à travers « des systèmes d’aires protégées efficaces, équitablement gérés, écologiquement représentatifs et bien connectés ». Un objectif que s’est déjà fixé une coalition, réunissant 50 pays et portée par la France lors de la quatrième édition du One Planet Summit en janvier dernier. Emmanuel Macron a annoncé vouloir tenir cet objectif dès 2022, avec 10 % de protection forte, et l’a inscrit dans sa stratégie nationale pour les aires protégées présentée dans la foulée de ce sommet.Théorie du changement du cadre mondial pour la biodiversité post-2020© Convention pour la diversité biologiqueLe projet de la CDB vise aussi la réduction de 50 % ou plus de l’introduction d’espèces exotiques envahissantes. Le cadre prévoit également de réduire d’au moins la moitié les pertes de nutriments dans la nature, d’au moins deux-tiers les pesticides, et d’éliminer les rejets de déchets plastiques. Enfin, le projet prévoit des solutions d’atténuation du changement climatique fondées sur la nature d’au moins 10 gigatonnes de CO2 par an, la réduction d’au moins 500 milliards de dollars (M$) par an des incitations néfastes pour la biodiversité, ainsi qu’une augmentation de 200 M$ des flux financiers internationaux vers les pays en développement.
« Vivre en harmonie avec la nature en 2050 »
Le projet de cadre mondial fixe également quatre objectifs pour atteindre le but ultime de « vivre en harmonie avec la nature » en 2050. Une vision sur laquelle les parties à la convention s’étaient entendues en 2010. Chacun de ces objectifs comprend deux ou trois grandes étapes intermédiaires pour 2030.“ Une action politique urgente aux niveaux mondial, régional et national est nécessaire pour transformer les modèles économiques, sociaux et financiers. ”Élizabeth Maruma Mrema, secrétaire exécutive de la convention sur la diversité biologiqueLe premier des quatre objectifs porte sur l’amélioration de l’intégrité des écosystèmes : réduction du taux d’extinction par dix au minimum, réduction du risque d’extinction de moitié dans tous les groupes taxonomiques et fonctionnels, maintien d’au moins 90 % de la diversité génétique au sein de toutes les espèces. Le deuxième objectif vise la valorisation, le maintien ou l’amélioration des contributions de la nature aux être humains. Le troisième tend à un partage juste et équitable de l’utilisation des ressources génétiques. Enfin, le quatrième objectif est celui de combler l’écart entre les moyens, financiers ou non, actuellement disponibles avec ceux qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs à 2050.
« Une action politique urgente aux niveaux mondial, régional et national est nécessaire pour transformer les modèles économiques, sociaux et financiers afin que les tendances qui ont exacerbé la perte de biodiversité se stabilisent d’ici 2030 et permettent le rétablissement des écosystèmes naturels dans les vingt prochaines années », explique Élizabeth Maruma Mrema, secrétaire exécutive de la CDB. Ces engagements ne concernent pas seulement les États parties à la convention. « Le cadre vise à galvaniser cette action urgente et transformatrice des gouvernements et de l’ensemble de la société, y compris les peuples autochtones et les communautés locales, la société civile, les jeunes, les entreprises et les institutions financières », précise cette juriste et diplomate de formation.
Le projet de cadre doit encore être mis à jour d’ici la fin de l’été avant de pouvoir être examiné lors de la COP 15. En tout état de cause, l’action est urgente. Car loin d’être enrayé, l’effondrement de la biodiversité se poursuit. Selon l’évaluation de l’état mondial de la biodiversité publiée en mai 2019 par l’IPBES(2), un million d’espèces sont menacées d’extinction. Les conclusions d’un atelier organisé par cette instance ont révélé en octobre 2020 que de futures pandémies plus meurtrières que la Covid-19 sont à craindre si la pression humaine sur la biodiversité ne s’allège pas. Enfin, en juin dernier, un rapport commun au Giec et à l’IPBES a souligné la nécessité de travailler de manière coordonnée sur les problématiques de climat et de biodiversité. Ce qui passe par une révision de nos modes de consommation.