Avec seulement 9 % de la population mondiale (748 millions de personnes), l’Afrique de l’Ouest, du Centre et du Nord porte un fardeau disproportionné dans la lutte contre le VIH/SIDA. Selon le nouveau rapport mondial sur le SIDA publié le 23 Juillet dernier, en 2023, cette région a enregistré des statistiques alarmantes:
– 13 % de toutes les personnes vivant avec le VIH (5,2 millions)
– 15 % de toutes les nouvelles infections à VIH
– 20 % de tous les décès dus au sida (130 000)
La région est loin de réaliser les objectifs fixés pour 2025 en matière de nouvelles infections et de décès liés au sida. En 2023, on comptait 196 000 nouvelles infections à VIH et 130 000 décès dus au sida, portant le nombre total de personnes vivant avec le VIH à 5,2 millions. Comparé à 2010, la tendance montre une augmentation des infections dans certaines parties du monde, notamment en Europe de l’Est, en Asie centrale, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Amérique latine. Cependant, des baisses significatives ont été observées en Asie-Pacifique, en Europe occidentale et centrale, en Amérique du Nord, dans les Caraïbes et en Afrique subsaharienne.
Disparités régionales et préoccupations
Bien que les nouvelles infections à VIH diminuent globalement en Afrique subsaharienne, cette baisse n’est pas uniforme. La diminution de l’utilisation des préservatifs chez les adolescents et les jeunes adultes, particulièrement dans les pays à forte prévalence du VIH, est préoccupante. Les messages de prévention ne semblent pas avoir l’impact escompté sur cette tranche d’âge, malgré l’importance des préservatifs pour prévenir le VIH, les infections sexuellement transmissibles (IST) et les grossesses non désirées.
Des efforts insuffisants
Pour combler les lacunes dans la cascade de soins, un traitement plus précoce et une meilleure rétention sont nécessaires. Actuellement, seulement 48 % des enfants vivant avec le VIH ont une charge virale supprimée. Le concept « Indétectable = Intransmissible » (U=U) n’est pas suffisamment compris par les décideurs politiques, les professionnels de santé et les personnes vivant avec le VIH, bien qu’il soit une avancée majeure dans la lutte contre le virus.
Les nouvelles infections par le VIH chez les enfants restent une problématique majeure. L’Afrique occidentale et centrale représente plus de 41 % des nouvelles infections verticales, tandis que l’Afrique orientale et australe en compte environ 43 %. Les programmes de prévention doivent s’assurer que les femmes reçoivent un traitement pendant la grossesse et l’allaitement.
Lutte contre la stigmatisation et la discrimination
Les progrès en matière de discrimination sont lents. Seuls trois pays (Eswatini, Rwanda et Argentine) sont proches de l’objectif concernant les attitudes discriminatoires envers les personnes vivant avec le VIH. Les obstacles aux soins, tels que la stigmatisation et la discrimination, doivent être levés pour améliorer l’accès aux services de santé. Environ 13 % des personnes vivant avec le VIH ont signalé des discriminations en cherchant des soins liés au VIH, et 25 % ont vécu des expériences similaires pour d’autres soins de santé. Un tiers des personnes confrontées à la stigmatisation ont interrompu ou arrêté leur traitement.
Besoins non satisfaits en contraception et ressources financières
Les besoins en contraception moderne restent élevés, surtout en Afrique subsaharienne, où près de 47 % des femmes adultes et 53 % des adolescentes (15-19 ans) n’ont pas accès à des méthodes modernes. Les financements pour la prévention du VIH et les programmes de soutien sont insuffisants. En 2023, entre 1,8 et 2,4 milliards USD étaient disponibles pour les programmes de prévention primaire, alors que 9,5 milliards seront nécessaires en 2025. Les dépenses pour les interventions en faveur des populations clés restent faibles, représentant en moyenne seulement 2,6 % des dépenses totales en matière de VIH.
Les dirigeants et les décideurs politiques doivent agir urgemment pour garantir l’accès aux services de traitement et de prévention. Respecter les droits de l’homme, abolir les lois injustes et lutter contre la discrimination sont essentiels pour une réponse efficace au VIH. Les financements doivent être augmentés pour atteindre les objectifs de 2025 et assurer une réponse durable au VIH, intégrée aux services sociaux et de santé, avec les communautés et les droits au centre.
La lutte contre le VIH/SIDA en Afrique de l’Ouest, du Centre et du Nord est à un tournant critique. Les efforts doivent être intensifiés pour combler les lacunes existantes, améliorer les programmes de prévention et de traitement, et assurer une réponse équitable et durable. Les investissements aujourd’hui détermineront l’atteinte des objectifs de 2025 et la viabilité des décennies futures.
Megan Valère SOSSOU